Tenet, ce Nolan qui ne tient pas la route.

Mon roi

Nolan, connu pour ses films alambiqués, capilotractés, plutôt bien rédigés et bien réalisés, nous aura régalés avec Memento, Insomnia, la trilogie des Batman, avec ce Joker sublimement interprété par Heath Ledger, Inception, Interstellar et, last but not least, Dunkerque. Je voulais en citer quelques-uns et, même si j’en ai, volontairement, oublié deux ou trois, on ne peut ignorer que l’intégralité de sa filmo est remarquable.

Nolan, je l’aime, je le respecte et je le coche sans hésiter dans les valeurs sûres du 7ème art.

Quand j’ai vu que sortait sur nos écrans son petit nouveau, avec histoires tortueuses, flash-backs à la pelle, explosions en tout genre et contrôle du temps, je n’ai pas pu m’empêcher d’aller le voir et ce malgré les avis négatifs que j’ai pu entendre çà et là parce que, comme pour tout dans la vie, quand quelque chose nous attire, on préfère se faire son propre avis.   

Un titre mystérieux ?

Rien que le titre peut nous aiguiller sur la globalité du film. Sans aller très loin dans l’analyse, car de toute façon il est difficile d’analyser un film qui manque autant de profondeur, on retiendra deux points :

  1. Tenet, c’est le verbe tenere, qui veut dire tenir en latin, obviously, conjugué à la 3ème personne du singulier. Et il faut bien le dire, ce film en tient bien une, de couche. Mais en réalité et sans aucune subtilité on pourra laisser notre cerveau vagabonder à trouver une signification simple, basique, tenir c’est pour tenir le temps, dans le sens, si poétique, de le contrôler.
  2. Ensuite, pour la linguistique parce qu’on aime ça, TENET est un bien joli palindrome qui renvoi à un scénario sans saveur à l’habileté abstraite et rédigé avec le pied gauche. Pas besoin d’avoir fait l’ENA pour capter qu’avec ce titre réfléchi on entre avec subtilité dans un univers où l’endroit et l’envers s’imbriquent pour ne faire qu’un…   

Et la déception fut…

Il n’y a pas pire dans la vie que le sentiment que procure la déception. Ce sentiment lancinant qui ne laisse au fond qu’un immense vide dans le cœur.

Et donc, bien pire qu’une simple destruction de ce que fut, autrefois, le grand art de Nolan, Tenet se pose davantage comme un tragique surplace à l’inertie fastidieuse qui, d’abord, assomme énormément et, en plus, ne mène pas très loin.

Jusqu’à présent Nolan savait savamment osciller entre grand spectacle explosif et réflexion, entre blockbuster et ciné d’auteur, et c’était la force de cet homme d’exception qui a su se créer cette place de choix, en jouant adroitement avec l’irréel pour faire voyager l’intellect du spectateur tout en glissant, avec cette souplesse et ce génie légendaires qui ont fait de lui une référence du 7ème art du XXIème siècle, des explosions et des scènes spectaculaires dignes des plus grands noms du film d’action. Un astucieux mélange entre Gondry et Bruckheimer, en somme.

En réalité je m’attendais à mieux, beaucoup mieux, surtout venant de lui, et la déception a été telle que me voilà dégringolant sans cesse pour finir par tomber, avec la dureté d’une réalité qu’on ne voulait pas voir, dans l’abîme de ma déception.

Avec Tenet, on sent qu’il a perdu le fil de son propre cinéma. Si dans sa filmographie on aura noté certaines accélérations, avec Inception ou Interstellar qui passent la seconde d’un Memento, ici nous sommes les spectateurs d’un gofast en twingo noire mat, quand même, parce que l’important, parfois, c’est le look, coco. Inutile, donc.

La déception par la précipitation

Le précepte de ce film, pourtant long, c’est cette précipitation qui, finalement, donne lieu à un bâclage informe. Tout est joliment torché, le scénario qui tient sur un ticket de métro resté dans sa poche de jean pendant deux mois, les personnages dont la profondeur équivaut à celle d’un verre à shot dans un bar miteux, la réflexion, malgré une idée de départ plutôt sympa et qui promettait une bonne migraine. Là, migraine il y a mais ce n’est pas parce qu’on a trop réfléchi, bien au contraire, mais plutôt parce qu’on a subi trop d’élucubrations sans intérêt.

Et pour moi le gros de la déception réside dans le fait d’avoir tout compris à la première lecture. Je me souviens être allé voir Memento au cinéma, être sortie de la salle obscure émerveillée mais totalement confuse de n’avoir rien pigé. Je me souviens m’être armée de patience pour attendre la sortie du film en DVD et, un an plus tard, je l’ai revisionné pour tenter d’en comprendre toute la subtilité et la complexité.

Ici, ce n’est clairement pas le cas car, en plus d’un scénario qui en annonçait beaucoup sans jamais tenir ses promesses, je me suis surprise à deviner les twists et la fin d’un film que j’attendais presque comme le messie qui aurait pu redorer le blason terni du cinéma ces derniers temps. Eh bien, triste constat, ce ne sera pas lui qui nous sauvera.

Le superflu au profit de l’essentiel

Le film développe alors un univers bien particulier qui n’est absolument pas cohérent avec lui-même. Impossible pour moi de préciser à quels niveaux car je n’ai ni le temps, ni l’envie, de m’attarder dessus, mais je me souviens clairement être sortie du cinéma avec cet arrière-goût amer de confusion absurde sur les rouages contradictoires d’un monde décousu.

Et on a cette sensation désagréable que Nolan a compris que son scénario ne tenait pas la route et que par flemme de réfléchir à tout rééquilibrer il aura préféré enfumer son auditoire.

Pour résumer le film : Que le superficiel soit…