Que vaut The Twilight Zone version 2019 ?

Cette série d’anthologie, crée par Rod Sterling en 1959, n’a de cesse de trouver des fans inconditionnels qui en relancent, à peu près tous les 20 ans, une nouvelle version.

Outre la première, de Rod Sterling donc, qui, censuré par ses pairs, utilise alors la science-fiction pour faire une critique acerbe de la société américaine ; ce sont quatre nouvelles versions qui envahissent nos écrans télévisés, dont un film à sketches, de 1983, composée de 4 séquences réalisées par John Landis (Blues Brothers), Joe Dante (Gremlins), George Miller (Mad Max) et Steven Spielberg (la liste est longue, ne citons que ET, Indiana Jones et Jurassic Park…), rien que ça.

Disney a même repris le concept et le nom de la série pour une attraction, The Twilight Zone Tower of Terror, qui a vu le jour en 1994 aux Etats-Unis et en 2007 en France.

Dans le jeu vidéo d’aventure/survival horror, Alan Wake, sorti en 2010, ultra narré et scénarisé, qui s’approche plus du thriller psychologique que du simple jeu de castagne, on peut découvrir quelques épisodes d’une série, Night Springs, totalement inspirée de celle de Sterling.

Une série qui a autant sa place dans le paysage culturel américain qu’un Doctor Who s’inscrit dans celui du Royaume Uni.

Sur le modèle d’un Alfred Hitchcock Présente…, avec ce ton pessimiste qui vise à dénoncer la société américaine de l’époque, cette série incontournable, considérée aujourd’hui comme l’une des meilleures de tous les temps a pour but « de frapper le téléspectateur, de le choquer par la chute toujours inattendue, surprenante et singulière de chacune de ces histoires ».

Et comme toutes les incontournables, elle a eu droit à bon nombre de remakes donc, mais aussi à son florilège d’acteurs singuliers, que je ne citerai pas, laissons planer un peu le mystère.

Depuis que Jordan Peele a défrayé la chronique, d’abord avec Get Out, son premier film derrière la caméra, et Us, son petit dernier, il a le vent en poupe et profite d’une atmosphère bienveillante pour ressortir la Quatrième Dimension de ses tiroirs poussiéreux.

Voici donc la version 2019, belle et sombre qui, après le succès de Black Mirror, et autres séries d’anthologie du même acabit qui ont pointé le bout de leur nez ces dernière années, se fraye un chemin sinueux dans le monde de l’anthologie du XXIème siècle.
Un siècle pas facile, soyons honnêtes, car si les thèmes des années 60, sujets aux critiques de Mr Sterling, sont à peu de choses près toujours d’actualité, s’ajoutent alors de nouveaux, rendant l’exercice parfois périlleux.

En un mot : Irrégulière


Après avoir visionné l’intégralité de la saison 1 de cette nouvelle version, il me reste un goût amer de déception. Si j’ai plus ou moins apprécié quelques épisodes, la plupart m’ont laissée de marbre, et d’autres m’ont carrément déplu. Il n’y aura donc, malheureusement, que trois épisodes sur dix qui m’auront un peu accrochée. « Le calcul n’est pas bon, Kevin », pourra dire quelque YouTubeur en colère, car finalement il en reste sept qui, si certains sont insipides, d’autres sont carrément mauvais.

L’exercice de la critique sociétale, point central de La Quatrième Dimension, n’est pas facile, cela va sans dire, et sa difficulté réside dans une problématique assez simple : ne pas tomber dans le cliché, ni dans le flagrant.

La preuve par l’exemple : l’épisode 3, Replay


Ecrit par Selwyn Seyfu Hinds, dont la culture afro-américaine n’est plus à présenter, l’épisode nous plonge dans une triste période pour la communauté noire. Après les bavures policières aux Etats-Unis qui ont entrainé, à juste titre, le mouvement #BlackLivesMatter, en 2013, force est de constater que le racisme des flics américains continue de faire rage. Sur fond de racisme blanc intemporel et non mérité et de sentiment amer de suprématie injustifiée, le scénario s’enlise dans la maladresse.

Malgré une idée de départ plutôt futée et un sujet de fond sans âge, l’épisode manque cruellement de subtilité. Comme son nom peut l’indiquer, l’épisode se concentre sur une caméra qui permet un retour dans le passé. Voilà l’astuce de l’épisode pour se faire quelques nœuds au cerveau. Mais, finalement, ce sera grossièrement réalisé pour sonner plus comme un règlement de compte sans finesse que comme une critique intelligente d’une réelle situation angoissante.

Si la trame de fond n’est pas à ignorer, on préfère nettement l’écriture et la réalisation de Get Out, qui offre une approche plus délicate.

Malgré le fait que cet épisode n’est pas, pour moi, le pire, c’est celui qui démontre le mieux qu’il n’est pas aisé de reprendre le flambeau de Rod Sterling.

Le fonctionnement des épisodes est vite compris, la chute n’apporte pas le degré de surprise, si chère à Sterling, difficile alors de garder un quelconque intérêt pour la série.

Évidemment, elle se regarde, surtout pour des aficionados de sciences fiction, d’horreur et de fantastique, comme moi… Mais cette version manque d’un petit je-ne-sais-quoi pour la faire décoller.

Malgré un producteur qu’on aime adorer et qui a, à plusieurs reprises, démontré ses talents scénaristiques, des scénaristes plutôt doués et un casting plutôt sympathique plaisant, ce remake n’a pas les épaules suffisantes pour assumer la comparaison avec ces prédécesseurs. Une version 2019, qui aurait pu être une des meilleures versions si l’intelligence de l’écriture avait pu se mêler aux effets spéciaux actuels, mais qui a malencontreusement raté le coche et qui, du coup, n’apporte rien.