You – saison 1 : petit plaisir malaisant

Joe, gérant d’une librairie new-yorkaise, rencontre Beck, une jeune écrivaine en devenir qui partage sa passion pour les livres et la poésie. Intimement persuadé qu’ils sont faits l’un pour l’autre, il va tomber dans une obsession malsaine et tenter d’éliminer tous les obstacles qui se dressent en travers du chemin de leur romance…

Un démarrage en trombe


Il n’aura pas fallu longtemps à la série pour accrocher le spectateur. Difficile de ne pas s’identifier à Joe, surtout que sa voix off vient ponctuer régulièrement les scènes de la série. Plongés malgré nous dans son esprit tordu, il semble vouloir nous éclairer sur ses motivations, en nous prenant pour des idiots incapables de saisir la complexité de son personnage.

C’est avec des phrases rapides et saccadées, légèrement envahissantes et qui se veulent intelligemment maniées que l’on comprend assez vite que Joe oscille entre amoureux transi et psychopathe invétéré.

Mais bon, Joe est craquant. Il est parfois même parfait. Comme la série évolue à travers son prisme et sa fameuse voix off, on est totalement envoûtés par ses élans romantiques et il arrive qu’on se surprenne à comprendre ses motivations.

Impossible ne pas apprécier la beauté de Penn Badgley. Surtout, difficile de le dissocier de son rôle de Dan Humpfrey dans Gossip Girl. Tout est là : le physique ravageur, la culture littéraire, la solitude romantique new-yorkaise… Il a cette beauté des hommes passionnés et mélancoliques, presque anachroniques dans une société de consommation effrénée. Finalement c’est un peu la version dark du beau gosse littéraire de l’Upper East Side.

Il a ce côté paumé du mec qui préfère les vieux livres à Instagram.Et on évolue avec lui, en comprenant rapidement que quelque chose cloche dans cette adorable petite tête, sans vraiment réussir à lui en vouloir.

Une critique notre société.


You se pose comme une critique d’une société obsédée par son image et par les réseaux sociaux. A l’inverse d’un Black Mirror, qui effraye par cette anticipation cauchemardesque de ce que la technologie pourrait apporter, You veut dénoncer la comédie que la connectivité à outrance nous impose de jouer. En somme, une critique des habitudes superficielles auxquelles notre société nous a lentement condamnés.

Tout y passe : la bourgeoise coquine qui veut que tout le monde l’aime, le hipster idiot et incompétent qui n’aime que lui et ses idées de start-up stériles.

Beck, l’héroïne fantasmée par les élucubrations incessantes de Joe, en prend aussi pour son grade. Geignarde, (trop) lente et posée, soit-disant cultivée, elle a ce côté agaçant des femmes romantiques. Elle remonte cependant la pente assez vite avec son sourire éclatant et ses beaux yeux bleus. C’est la nana presque parfaite jusqu’à ce que ses failles soient progressivement dévoilées à travers la narration de Joe.

Essaie encore…


Malheureusement, si l’idée de départ n’était pas mauvaise, elle est mal exécutée. Se servir d’un psychopathe romantique obsédé par l’amour et la passion que ses bouquins lui ont inculqué comme trame de fond pour dénoncer les dérives de notre société ultra-connectée est un concept plutôt bon. Mais la série se croit plus intelligente qu’elle n’est et se perd dans un certain narcissisme.

Avec son ambiance urbaine, so NYC, légèrement libertine, c’est une série qui se veut moderne, très millenials. On évolue dans un monde cliché, figé comme ces photos insta et leurs descriptions téléphonées, avec lattés vegan et dernier smartphones à la mode.

Final décevant, personnages bâclés, psychologie trop faible… La série n’est simplement pas aussi intelligente qu’elle ne le pense. Mais elle se regarde et peut même s’apprécier. Encore un psychopathe qu’on aime « binge-watcher », tout en sachant au fond qu’on n’est clairement pas devant un chef d’œuvre.