Le Pianiste, le film de ma vie
Hier je me baladais nonchalamment sur Twitter et je regardais ce qui était en Top Tweets histoire de voir ce qui secoue le monde en ce moment. Je vois Auschwitz en 2ème. J’avoue que j’ai eu un frisson, ce nom aura toujours ma peau. Je clique dessus histoire de connaitre le fin mot de l’histoire et je vois que la « polémique » c’est que le maire écolo de Lyon a décidé d’annuler le voyage des lycéens à Auschwitz pour qu’ils ne prennent pas l’avion. En réalité, une rapide recherche Google m’a permis de connaître la vérité : la vraie raison c’est la guerre en Ukraine, parce que je suis partie à Auschwitz avec le lycée, moi aussi, et c’était en car hein. Anyway, ça m’a aussi rappelé que demain (27 janvier) ce sera les 78 ans de la libération d’Auschwitz et pour l’occasion j’ai décidé de faire une semaine thématique sur la Shoah. 2ème jour, 2ème film : Le Pianiste.
L’argument : Durant la Seconde Guerre mondiale, Wladyslaw Szpilman, un célèbre pianiste juif polonais, échappe à la déportation mais se retrouve parqué dans le ghetto de Varsovie dont il partage les souffrances, les humiliations et les luttes héroïques. Il parvient à s’en échapper et se réfugie dans les ruines de la capitale. Un officier allemand, qui apprécie sa musique, l’aide et lui permet de survivre.
Grand film, grande responsabilité
Le film est merveilleux, la preuve, son palmarès : une palme d’or, sept césar et trois oscars. Adapté du roman autobiographique éponyme de Wladyslaw Szpilman, le film est un hybride poignant entre la transposition honnête et sans fioritures des horreurs d’une guerre et des barbaries nazies et le ressenti personnel de Roman : il sera parqué dans le ghetto de Cracovie pendant 3 ans puis survivra en passant de familles catholiques en familles catholiques pendant près de deux ans. Sa mère et sa sœur sont mortes à Auschwitz et il retrouve son père en 45, survivant du camp de concentration de Mauthausen. Roman n’a que 12 ans. Sacré trauma donc qui transpire dans toute son œuvre car c’est finalement à travers le 7ème art que Polanski tente sa plus grande thérapie.
Dans les années 90, Spielberg lui propose de mettre en scène la Liste de Schindler mais Polanski refuse car trop proche de son vécu. Il connaissait personnellement des gens sur cette liste et son but à lui n’était pas de réaliser un film autobiographique mais de se servir de son expérience personnelle et de la mêler à un film de fiction. C’est ainsi qu’est né le Pianiste.
Mis en scène à la perfection, on ressent toute la délicatesse du traumatisme de Polanski. Voulant s’affranchir de l’autobiographie, il a étonnamment choisi d’adapter l’autobiographie d’un rescapé de l’Holocauste et, pendant tout le film on découvre les horreurs et la cruauté au travers les yeux d’un seul homme. Ce sera finalement une façon, mi fictive mi réelle, de partager son vécu, son ressenti, son histoire avec les spectateurs.
Pendant une heure, Polanski nous livre du cinéma magistral : il retranscrit à la perfection la vie dans le ghetto. De l’aberration que cela représente, aux violences commises par les allemands vis-à-vis des juifs, l’incompréhension totale face à toutes ces barbaries et l’individualisme des juifs qui tente de s’en sortir dans le ghetto. Et puis c’est la descente encore plus bas pour Spilzman – je voulais dire aux enfers mais concrètement il y était déjà – qui ne devient qu’une plaie béante, qui tente de s’en sortir à tout prix, grâce à son amour de la musique. Et finalement à travers ce film, Polanski choisit de tout montrer puisque, je l’ai dit plus haut, ce film est pour lui une thérapie de ses traumas : les allemands ne sont pas tous des barbares sans once d’humanité, les juifs ne sont pas tous exempts de tous reproches. C’est bien ça qui fait la complexité de l’être humain. Bien entendu, même si on tente légèrement de nuancer, l’Histoire nous l’a bien démontré : même si les allemands ne sont pas tous de fieffés connards et les juifs ne sont pas tous de gentils innocents, la balance aura tout de même tendance à sacrément pencher en faveur d’une communauté.
Bouleversant parce qu’authentique
Au delà du fait qu’il s’agisse d’une période réelle de notre Histoire, le film étant une adaptation de l’histoire vraie de Spilzman le rend d’autant plus poignant. En visionnant ce film (je pense que je vais le regarder ce soir, d’en parler là ça a généré en moi cette envie irrépressible de le revoir), difficile de ne pas se questionner sur un vaste sujet, toujours d’actualité malheureusement : qu’est ce qui peut bien pousser l’homme à franchir ainsi les frontière de la barbarie. Qu’est ce qui pousse un peuple entier à se faire manipuler par un bon orateur, certes, mais tout de même. Alors je sais que la période était particulière, que l’esprit et le moral des allemands étaient brisés à cause de la Première Guerre Mondiale, qu’ils n’attendaient qu’une chose, que quelqu’un ou quelque chose les sorte de là. Finalement se sortir de la merde en écrasant les autres est une triste réalité de l’humanité. Quand on se noie, si quelqu’un tente de nous sauver on appuie sur sa tête pour respirer. L’individualisme dans le reflexe de la survie… Ca ne justifie en rien, à mon sens, la barbarie et l’horreur qui ont été élaborées lors de cette funeste période. Mais une question me taraude et ce depuis le plus jeune âge : pourquoi toujours les juifs ? Certains diront Jésus, la croix, tout ça, mais Moïse en Égypte c’était bien avant. N’en déplaise à certaines figures antisémites actuelles, les juifs sont bien les martyrs du monde. Parenthèse fermée.
Film fort, poignant, plein d’espoir, comme beaucoup de films sur ce sujet car en réalité l’espoir c’est bien tout ce qui restait aux juifs déportés. On évolue avec une immensité dramatique dans ce film de 2h20 en suivant le parcours et le destin de Wladislaw Spilzman, joué à la perfection par l’un des meilleurs acteurs de ma vie : Adrian Brody, à travers la musique et les atrocités nazies, à travers la beauté de l’art et la violence de la guerre, à travers l’innocence de tout un peuple et la culpabilité infame d’un autre. J’en ai (enfin) fini avec ce film grandiose, prochaine étape : Everything is Illuminated.